"tu veux être mon amie?"
Voilà presque un an, je suis arrivée dans une nouvelle région, sans ami, sans boulot. Bon je veux pas faire pleurer dans les chaumières, je précise : j'avais mon chéri quand même.
J'avais envie de raconter ma "solitude" et ma recherche de rapports humains et surtout amicaux alors voilà mon résumé, mon récit, un peu comme un parcours du combattant, en quatre saisons
Eté
Arrivée
dans une ville où je ne connais personne, à plusieurs centaines de km de chez
moi ou plutôt de mon ancien chez moi car à présent c’est cette ville sans
repère qui va être mon foyer, mon royaume.
Après l’été vient le
constat : pas du tout évident de rencontrer des gens ou plutôt de nouer de
nouvelles amitiés dans une ville que l’on ne connaît pas, sans travail, sans
études pour se procurer les quelques amorces propices à un renouveau de vie
sociale.
L’horreur !? Le chômage dans une ville inconnue. Toute seule toute
la journée à parler à son chat ou à sa conseillère ANPE. Chouette
programme !
Je décide donc de prendre mon
courage à deux mains.
Automne
Je
m’inscris à des clubs, je teste des activités culturelles et sportives. J’ai
plein de temps à y consacrer et malheureusement peu d’argent donc je me limite.
En limitant aussi les occasions de rencontres. Dommage.
Au bout de quelques temps, j’ai du
mal à articuler quelques mots simples... Ok je plaisante mais une vraie discussion
en face à face avec un autre humain devient rare et précieuse. J’en arrive à me
réjouir de discuter avec une caissière de grand magasin !
Dès que je suis en situation de
rencontrer de nouvelles personnes, je souris, j’essaye d’être détendue et
détachée, de ne surtout pas avoir l’air seule. La solitude fait peur, c’est bien
connu. Si je demandais aux filles de la gym « Tu
veux bien être mon ami ? », j’aurais vraiment l’air conne, non ?
Hiver
Finalement je crée quelques contacts, on se donne des premiers rendez-vous pour
boire un verre et faire mieux connaissance. Enfin un premier vrai rendez-vous
pour connaître quelqu’un ! Soudain, angoisses : et si on ne
s’entendait pas ? Peut-être est-elle tout le contraire de moi ?
Peut-être va-t-elle me faire une proposition indécente :
« l’échangisme, ça te tente ? ». Peut-être va-t-elle tenter de
me convertir à sa foi : « As-tu déjà entendu parler de notre
Sauveur ? ». Ou peut-être va-t-elle me trouver stupide ? Je
doute de tout, de moi surtout.
Je cherche des sujets de
conversation qu’on n’abordera pas. Comme les scouts, je suis prête à tout.
Prête (ou presque) à tout accepter pour avoir à nouveau une amie. Mais attention,
il ne faut pas non plus trop insister, être trop collante sinon je vais la
faire fuir… Surtout paraître cool, drôle, branchée… Séduire ! Au risque
même de perdre peut-être un peu de son identité…
Le rendre-vous est arrivé. Il n’était pas
galant, ni professionnel mais tout de même assez important. Vais-je me trouver
une amie ? Il semble que oui, potentiellement. Nous avons quelques points
en commun. Pas non plus de propos intolérants ou excessifs. Pas de vices cachés.
Propre sur elle. Je pense que je vais pouvoir poursuivre et lui proposer un
second entretien. Je plaisante, mais il me passe en tête mille questions, mille
problèmes.
Par exemple, ne sachant pas ses
goûts je teste, je pose des questions, peut-être fais-je des impers…
Situation critique : une musique passe à la radio.
Elle me dit : « J’écoutais ça au lycée. C’est sympa mais c’est
gentillet tout de même. Et maintenant ça redevient à la mode » Aïe !
Moi ce groupe je l’aime, il m’accompagne toujours même si mes goûts ont changé.
Comment réagir ? Affronter la critique et lui dire que moi je l’aime
toujours ce groupe, que j’y reviens fréquemment et que je ne rate jamais leur
nouveau cd… Possibilité de silence gêné…
Ou alors ne rien dire, laisser
faire le temps et oublier ça. Surtout qu’elle ne soit pas mal à l’aise quand
viendra cette découverte ! Enfin, peut-être s’en fout-elle totalement ?
Je me prends un peu trop la tête… Je retourne en arrière. Période 4e
/ 3e au collège. Quand j’étais pas invitée aux booms, avec mes
lunettes vertes, mon petit 1,50m et ma grande timidité. Au secours !
Printemps
Dans moins de 2 mois cela fera
déjà 1 an que je suis ici.
A présent je sors régulièrement avec 2 ou 3 "amis", si tant est qu'on puisse les qualifier déjà ainsi. A partir de quand peut-on dire que l'on est ami avec quelqu'un ? Quelle est l'étape fondamentale, s'il y en a une ? Après tout, peu importe si ça fonctionne ou pas entre nous, l’important est de
prendre du bon temps sans se forcer, sans rajeunir, sans se perdre. Aucune amitié n’est identique.
On prend et on donne différemment selon chacun. Parfois il suffit d’une
rencontre, d’un rire échangé dans un couloir pour savoir que vous
avez une amie pour toujours. Et parfois le temps prend son temps pour vous
donner quelqu’un à aimer. C’est comme une histoire d’amour, une histoire
d’amitié. Et pour l’une comme pour l’autre, il faut savoir profiter des premiers
pas…
Il
n’y a pas longtemps on m’a demandé si je me sentais chez moi maintenant ici… Je
n’ai pas su quoi répondre. J’ai l’impression que je ne saurai jamais quoi
répondre. Comme à la fin de L’Auberge Espagnole, je suis Lille, je suis Caen,
je suis mes amis d’avant et ceux de demain. Je suis chez moi partout où des
gens comptent pour moi. J’ai l’impression en fait d’être arrivée hier et que la
route n’est qu’à son premier virage. Mais le chemin a quelque chose d’excitant
et le paysage est sympathique alors je profite.